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Retour à Stan. Il me semble qu'une partie de la FATAC y a émigré. On les comprend. La vie -et le nourriture- dépassent de loin celles de
BAKA...et puis, ils y perçoivent des primes de danger.

Le Major Avi Blum, commandant en second de la FATAC me fait part de ses inquiétudes. Une aile de notre Congo Palace a été réservé àdes membres de la 5è Brigade Mécanisée et à des mercenaires. Certains n'hésitent pas à passer la nuit avec des femmes noires. Le lendemain matin, elles les quittent mais après leur avoir volé des munitions. des pirogues passent la Tshopo de nuit pour ravitailler les rebelles.

Et l'aérodrome est aux premières loges pour recevoir ces munitions en retour...

Ordre aux patrouilles d'ouvrir l'oeil et de se renseigner discrètement. Quelques jours plus tard, je sais à peu près où s'effectuent les transbordements nocturnes.

Dans l'après midi, une section renforcée d'une équipe F.M. s'installe en bouchon en amont pour couvrir notre embuscade. A la nuit tombés, la jeep armée d'une mitrailleuse .50 et l'auto blindé M8 prennent position le plus discrètement du monde. Le major Blum a tenu
à nous accompagner " en simple tirailleur". C'est un fin fusil et son FAL pourrait nous servir à point.

Une parenthèse...

...pour expliquer la présence de ces matériels. Les mécaniciens "cubains" nous ont fait cadeau de la mitrailleuse. Capricieux, l'engin: il suffit de lui poser sans cache-flammes pour l'empêcher de tirer. Sans cet accessoire, il fonctionne à merveille. Un trépied soudé à l'arrière de la jeep légèrement blindée et le tour fut joué.

Une ou deux semaines avant cette embuscade, un C-130 de l'USAF avait déchargé une auto blindé US M8 sur le tarmac. Une belle pièce avec son canon de 37 mm et sa mitrailleuse. 30 jumelée en tourelle...Personne s'y intéressait...sauf Charly Werdefroy. Il la mit en marche et la rangea sur le petit parking derrière la tour de contrôle.

Voilà le noyau d'un escadron d'intervention...

L'embuscade (suite)

Le temps passe. Par moments, des nuages masquent la lune. Personne ne broche ni ne fume. Les Noirs possèdent une vue plus perçante que nous mais pour une fois, j'ai aperçu le pirogue juste avant le chef de la section mortier.

Malheur! Les bombes ont pris de l'âge. La première éclaire faiblement puis s'éteint, la seconde la suit de tout près mais s'éteint aussi?

Tous le monde a pu voir pourtant une pirogue glisser sur la rivière vers l'autre rive et toutes les armes crachent y compris le canon servi par Werdefroy. Il tire trop bas, l'animal! Je hurle "Allonge le tir!" et il obéit. Dans la vacarme, je reconnais les coups de départ caractéristiques du FAL de Blum. J'aperçois les traçantes frapper le pirogue. Werdefroy continue à relever son tir et puis, soudain, la planète explose.

Inutile d'ordonner le cessez-le-feu. Nos armes se taisent, une dernière fusée, juste avant de s'éteindre, m'a permis de voir la pirogue renversée, à demi coulée, partir à la dérive.

Un dépôt de munitions?

de retour au Congo Palace, devant le dernier verre avec Blum, je m'interroge: que s'est-il passé? L'écho du canon? Le 37 mm me semble
bien trop petit pour un pareil vacarme.

Un des derniers clients du bar me confie que les carreaux ont tremblé. Certains ont cru à un attentat ou à un bombardement. Aurions-nous touché un dépôt de munitions? A force de hausser le tir du 37 mm, Werdefroy aurait-il placé bien in volonté, là où les rebelles entassent leur butin?

Je finirai par le croire...

Un village rallié

Le lendemain, l'état-major de al 5è Brigade exprime son "étonnement" de ne pas avoir été tenu au courant d'une expédition de l'U Def "en dehors de l'aérodrome". Ni Blum ni moi n'avons la langue dans le havresac. Nos brèves explications satisfont ces messieurs mais font des jaloux.

Quelques jours plus tard, une patrouille m'avertit que le chef du village de l'autre rive de la Tshopo demande à me parler. Je lui fixe rendez-vous pour le surlendemain au bac, j'irai seul et sans arme (apparente, courageux mais pas fou).

Le bonhomme parle un français haché mais compréhensible. Il me tient à peu près ce langage. Terrorisés par la destruction de leur camp, les rebelles ont fui ailleurs mais ils pourraient revenir voler des femmes et de la nourriture. Le chef demande la protection de l'armée. Sans pouvoir le lui avouer, je me sens impuissant. Cette mission incombe à la 5è Brigade et son état-major refusera de déplacer une garnison même minime.

Le surlendemain, même rendez-vous. Comme je le redoutais, la 5è Brigade refuse de déplacer une garnison. Conseil au vieux chef: former une milice d'autodéfense avec ses guerriers; ils possèdent des armes traditionnelles. Je leur offre un fusil de chasse avec des mutions (les yeux du chef brillent de convoitise, j'ai gagné) et un fusil Mauser 7,65 mm avec les munitions. Il n'a pas le choix, il accepte
et le fusil de chasse n'y est pas pour rien. Depuis lors, à ma connaissance, il n'y eut plus jamais d'incident dans son village.

Retour aux problèmes.

Retour à Baka où les problèmes ne manquent pas. Le premier contingent de Mutombo Mukulu est arrivé. Roger Scarsé a épuisé nos dernières réserves pour les habiller; l'armement est de plus hétérosis mais il suffit. Pour l'instant.

Ils me procurent des armes: 20 SA/FN, une cinquantaine de Mauser 7,62 mm, deux F.M., trois mitraillettes Brescia.

A Stan, Christian Hornaert a "trouvé" des Mausers mais de 7,65 mm de l'ex-Force Publique et des mitraillettes Sten.

Cet armement hétéroclite me donne une idée. La future 2è Escadrille comportera une "Section d'Assaut" (les Noirs adorent des titres ronflants) équipée d'armes automatiques, mieux entraînée que les autres, prompte à intervenir dans des coups durs avec son F.M. et ses deux mitraillettes.

Parmi les "déchets", je choisis une demi douzaine de soldats. Un entraînement intensif à Baka d'abord et surtout à Stan, les rend aptes à l'emploi des mitrailleuses et du mortier...comme servants. Voilà la "Section d'appui".

La 3è Escadrille sera "classique", comme la 1ère. La 4ème, en fait, n'existera que comme escadrille de renfort et de réserve. Ses soldats, formés des "déchets" ne seront engagés qu'en cas de remplacement urgent.

Le commandement...et ses problèmes.

Dès qu'un "instructeurs" U Def se trouve à Stan, ç Paulis et, plus tard à Bunia, il perçoit des primes de danger. Je ne puis en priver certains au bénéfice d'autres. J'organise donc une rotation, non de chefs de pelotons mais de "commandants de la défense" de tel ou tel
aérodrome.

Les relèves commencent à tourner rond: les pelotons de la 2è arrivent à Stan pour relever ceux de la 1ère. On devine la joie des permissionnaires même s'ils doivent abandonner provisoirement leurs concubines.

De mon côté, à Baka, je profite de quelques relations avec des anciens de la Gendarmerie katangaise pour me procurer des armes et des munitions en provenance des stocks de l'ANC et de la 5è Brigade.

Malheureusement, il manque toujours de quoi armer de 3è. Après un voyage à Léo, je reçois une cinquantaine de SA/FN.

Se pose alors le problème des munitions. Ainsi, un peloton armé de vieux Mauser 7,65 mm devra toujours se déplacer avec ses munitions! D'où la solution: l'unité de relève partira sans armes et celle relevée lui cédera les siennes. Les passagers des DC-3 en seront moins lords.

Le cadre s'étoffe.

Puisque VS1 ne veut pas augmenter le cadre européen, autant recruter nous mêmes. Henri Bertrand dit Riton nous rejoint le premier. Il sera jusque 1965 le seul mercenaire de la FATAC.

Notre petit "trafic" d'armes ne se conçoit pas sans armurier. Nous en annexons donc un: il vit à Stan avec les u Def et se considère comme l'un d'entre eux. L'état-major de la FATAC, Dieu sait pourquoi, nous passe l'adjudant Bourguignon pour aider Roger Scarsé dans l'administration. Restés seuls à Baka, Scarsé et Carlier avaient bien besoin de son aide.

Quant à moi, toujours sans adjoint, je voyage, Stan, Paulis, Léo et à l'occasion, E'ville où je retrouve de vieux amis pour un week-end.
Extraits du journal personnel du Commandant de l’Aviation August Servais
Mise en page par Eric Van Heuverswyn
L' EMBUSCADE
© Eric Van Heuverswyn